COLLABORATION JILL DICKSON, CONSULTANTE EN NUTRITION ÉQUINE ET KATERINE PARD, AGR.
ARTICLE PARU DANS
CHEVAL QUÉBEC MAGAZINE - ÉTÉ 2017 - VOL.35 NO.2 |
Équilibrer une alimentation à base de foin seulement
En bon amoureux des chevaux, vous savez qu’il est essentiel d’offrir amplement de foin de bonne qualité à votre cheval pour sa santé physique tout autant que mentale. Mais si la cote de chair de votre cheval se maintient si facilement qu’il n’est pas nécessaire de lui donner d’autres aliments concentrés, pourrait-il trouver tous les nutriments dont il a besoin dans son foin ou au pâturage ? Qu’en est-il s’il a accès à un bloc sel avec oligoéléments ? Malheureusement, la réponse à ces questions est non. Même dans du foin ou des pâturages de qualité, certains des nutriments essentiels au cheval manqueront inévitablement. Si vous négligez de lui fournir des suppléments, cela pourrait, avec le temps, mener à des carences en vitamines, en minéraux et en protéine de qualité (acides aminés). Les chevaux ont besoin de divers nutriments pour répondre à leurs besoins quotidiens et s’ils ne les consomment pas en quantité suffisante, ils pourraient présenter des symptômes de carence. La gravité de ces symptômes variera en fonction de la nature et de la durée de la carence. Chez le cheval adulte au repos, certaines carences peuvent se manifester par un pelage terne, des sabots en piètre état ou une masse musculaire déficiente. D’autres peuvent avoir moins d’appétit, un système immunitaire affaibli, des performances compromises ou une reproduction plus compliquée. Chez les chevaux en pleine croissance et chez les juments gestantes ou en lactation, ces carences peuvent nuire à la croissance et au développement sain du poulain, prédisposer le poulain à certaines maladies ou pousser la jument à épuiser ses propres réserves de nutriments pour combler celles de son petit. En tant que propriétaire, il est possible que vous vous doutiez que l’alimentation de votre cheval est déficiente sans pour autant savoir exactement ce qui manque ou comment rectifier la situation. Nombreuses sont les possibilités en matière d’alimentation des chevaux et les recommandations peuvent parfois être mal interprétées. Les vitamines et les minéraux : les nutriments les plus souvent négligés Les minéraux peuvent être classés en deux groupes : les macroéléments, dont l’apport recommandé se mesure en grammes par jour, et les microéléments (oligoéléments), dont l’apport se mesure en milligrammes par jour. Les macroéléments comprennent le calcium, le phosphore, le sodium, le potassium, le magnésium, le soufre et le chlore. Les oligoéléments sont le fer, le cuivre, le zinc, le manganèse, le sélénium et le cobalt. La description des rôles de chacun de ces minéraux dépasse les objectifs du présent article, mais l’importance de chacun d’eux, en quantité suffisante et en bonnes proportions, est essentielle. L’importance du ratio entre les apports de calcium et le phosphore est bien documentée — la quantité absorbée de l’un d’entre eux peut avoir une incidence sur l’absorption de l’autre — et l’équilibre entre les différents minéraux doit être pris en compte pour garantir une alimentation qui saura répondre aux besoins de votre cheval. Lorsque l’on aborde la question de l’équilibre entre les différents minéraux, il ne faut pas négliger l’importance de l’analyse de foin. Comment pouvez-vous établir que l’alimentation de votre cheval réponde à tous ses besoins si vous ne connaissez pas la valeur nutritionnelle de votre foin ? Le foin a un contenu en minéraux variable et le calcium est le nutriment pour lequel les variations sont les plus importantes d’un foin à l’autre. Il est particulièrement important de faire analyser la teneur en calcium et en phosphore du foin qui sera servi aux juments et à leurs poulains. Il sera alors possible de faire certains ajustements pour optimiser leurs rations et assurer le bon développement osseux du poulain. Le sélénium est un oligoélément important dont il faut tenir compte. Puisque les sols de l’Est du Canada ne contiennent pas de sélénium, ou en contiennent très peu, les pâturages, le foin et le grain ne peuvent pas fournir à vos chevaux un apport suffisant de sélénium. Pourquoi est-il si important ? Le sélénium est un oligoélément essentiel — nécessaire en très petite quantité — qui agit principalement comme un antioxydant de concert avec la vitamine E. Ensemble, ils préviennent l’oxydation des membranes cellulaires et des enzymes et réduisent les risques de problèmes musculaires comme la maladie du muscle blanc et la rhabdomyolyse d’effort récidivante. Le sélénium a retenu l’attention ces dernières années en raison du nombre de décès de chevaux qui en étaient carencés. Toutefois, aussi graves que puissent être les conséquences d’une carence en sélénium, un excès de sélénium peut l’être tout autant en raison de sa toxicité. Trop c’est comme pas assez ! La prudence est de mise lorsque vous ajoutez du sélénium à la ration de votre cheval. Lisez bien les étiquettes et suivez attentivement les instructions, en particulier lorsque vous utilisez plus d’un produit contenant du sélénium. Dans le doute, communiquez avec un consultant en nutrition équine qui s’assurera que les quantités servies sont adéquates. Voir aussi : « Le sélénium démystifié », Cheval Québec magazine, automne 2016, Vol. 34 No. 3 p. 6-8. Les déséquilibres en minéraux peuvent également se manifester par des symptômes de carence. Un trop grand apport de phosphore peut causer une carence en calcium tout comme un excès de zinc causera une carence en cuivre. Lorsqu’on équilibre l’alimentation dans le but d’optimiser la santé de notre cheval, il est important de réaliser qu’il est dangereux d’ajouter un minéral sans bien comprendre l’effet qu’il a sur les autres. Finalement, en ce qui concerne les vitamines, il faut se rappeler qu’en théorie les chevaux ont besoin principalement des vitamines liposolubles A, D et E. La vitamine E régule le système immunitaire du cheval, notamment en augmentant sa résistance aux maladies et au stress. Puisque ce sont les fourrages verts qui ont la plus haute teneur en vitamine E, les chevaux qui ont un accès limité à des pâturages, épuiseront les réserves en vitamine E stockées dans leurs tissus adipeux, leur foie et leurs muscles squelettiques. La vitamine E joue aussi un rôle essentiel pour le développement et le bon fonctionnement des nerfs et des muscles chez les chevaux en croissance. Les juments ont, elles aussi, des besoins accrus en vitamine E pendant le dernier trimestre de la gestation en raison de la synthèse rapide des tissus du poulain. La vitamine A est elle aussi une vitamine liposoluble que les chevaux sont en mesure de stocker. Les fourrages verts contiennent du carotène que les chevaux transformeront en vitamine A. Notons que dès que le foin est coupé, la teneur en carotène commence à diminuer. Considérant le nombre de mois par année où, au Québec, il est nécessaire de servir du foin à nos chevaux, il devient évident qu’il est important de servir un supplément en vitamine A pour éviter les carences. Il faut également garder en tête que la vitamine A peut devenir toxique en trop grande quantité. Soyez attentif aux rations que vous offrez, surtout si vous ajoutez des suppléments de vitamines à des produits déjà enrichis. Théoriquement, des pâturages de bonne qualité pourront fournir de la vitamine K et des vitamines du complexe B en quantité suffisante. Toutefois, comme les chevaux n’ont pas accès à de bons pâturages pendant toute l’année au Québec, il pourrait être avantageux de leur offrir des suppléments pour une santé optimale. L’ajustement des quantités de vitamines et de minéraux dans la ration du cheval demande des connaissances techniques approfondies en nutrition, de nombreuses précautions et du temps, beaucoup de temps ! L’option la plus réaliste qui s’offre aux propriétaires souhaitant servir une ration équilibrée à leurs chevaux est de choisir des aliments industriels spécialement conçus pour répondre aux besoins en vitamines et minéraux des chevaux dont l’alimentation est à base de fourrage. Que dire du bloc de sel avec oligoéléments laissé au champ ? Bien que très pratique en apparence, ces blocs sont principalement composés de sel (chlorure de sodium) et leur teneur en oligoéléments est bien faible. Ils ne peuvent donc pas répondre aux besoins nutritionnels de votre cheval. Ils ne répondront même pas à ses besoins en sel ! Les blocs à lécher sont conçus pour le bétail dont la langue est beaucoup plus rugueuse que celle des chevaux. Ces derniers arrivent rarement à lécher suffisamment de sel pour répondre à leurs besoins quotidiens. Du sel granulé doit être offert à votre cheval, à volonté ou ajouté à sa ration quotidienne. Quels sont donc les choix qui s’offrent aux propriétaires soucieux de répondre aux besoins en vitamines et minéraux de leur cheval si la cote de chair de ce dernier se maintient facilement et que son alimentation est à base de fourrage ? Un supplément compensateur, comme Equilizer ou Optimal, est faible en calories, en sucres et en amidon. C’est un choix pratique, sous forme de granulés faciles à mesurer et à faire manger, qui répond aux besoins en vitamines et minéraux des chevaux au pâturage, ou de ceux à qui on ne sert que du foin. Equilizer est formulé pour les chevaux adultes dont l’alimentation — à base de fourrage vert ou sec — contient suffisamment de protéines. Optimal est parfait pour les poulinières et les chevaux en pleine croissance qui ont besoin de suppléments d’acides aminés pour répondre à leurs besoins accrus. Les deux contiennent du cuivre, du manganèse et du zinc de source organique, ce qui facilite leur assimilation. Optimal contient aussi du sélénium organique puisque des études ont montré que son assimilation chez les poulinières et les poulains en croissance s’avérait supérieure sous cette forme. En résumé, même la meilleure qualité de foin ne peut fournir tous les nutriments essentiels aux chevaux. Il est donc nécessaire de leur offrir des suppléments pour assurer une santé optimale et prévenir les carences. Choisissez un produit conçu pour répondre aux besoins de votre cheval selon son stade de vie et son niveau d’activité. Portez aussi une attention particulière au mode d’emploi pour faire en sorte que votre cheval consomme tous les nutriments dont il a besoin en quantité suffisante. |