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Les paroles s'envolent, les écrits restent

ME BENJAMIN POIRIER
DROIT DES ASSURANCES ET RESPONSABILITÉ CIVILE MICHAUD LEBEL
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Un contrat écrit sera toujours la meilleure preuve d’une entente. Dans le milieu équestre, il y a encore trop d’ententes verbales, selon nous. Par ailleurs, cela se comprend bien. Comme amateurs de chevaux, nous aimons nous entourer de gens qui ont la même passion que nous. Pour garder les choses simples, nous préconisons l’entente verbale concernant, par exemple, les demi-pensions, les quarts de pension, les cours d’équitation achetés en bloc ou payés par du travail de palefrenier, etc. Les situations ambiguës ne manquent pas et les sources potentielles de mésentente sont faciles à anticiper. C’est ce qu’ont appris à leurs dépens deux amateurs de chevaux qui auraient conclu, ou non, une entente pour les soins et l’entraînement du cheval appartenant à Madame.

Monsieur a saisi le Tribunal pour être remboursé de certains montants prétendument engagés pour les soins et l’entraînement du cheval de Madame. Lors de l’audition, le Tribunal était confronté à deux versions contradictoires. Néanmoins, le Tribunal a retenu de la preuve présentée, de part et d’autre, les éléments énumérés ci-dessous.
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LES FAITS
Vers le mois de janvier 2013, Madame acquiert un cheval pour la somme d’environ 5 700 $. En 2016, elle fait la rencontre de Monsieur sur les réseaux sociaux. Rapidement, Monsieur et Madame découvrent leur passion commune pour les chevaux. Monsieur offre alors à Madame de l’aide avec l’entraînement de son cheval. Monsieur a acquis ses compétences d’entraîneur avec les années et l’expérience.

À cette époque, le cheval de Madame est en pension près de chez elle. Donc, de janvier à août 2017, Monsieur se déplace régulièrement dans la région de Madame pour entraîner son cheval qui progresse de manière remarquable. Monsieur se serait rendu voir le cheval de Madame à raison de cinq jours par semaine, alors que Madame prétend que la fréquence des visites de Monsieur était de deux jours par semaine, les fins de semaine.
En septembre 2017, le cheval de Madame sera dorénavant en pension dans la région de Monsieur pour être plus près de lui, selon l’admission de Madame.
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La preuve présentée par Madame et Monsieur a semblé converger sur le fait que Madame était tombée amoureuse de Monsieur, qui, de son côté, ne partageait pas ses sentiments. Madame rapatria son cheval dans sa région lorsque Monsieur lui fit comprendre qu’il avait quelqu’un d’autre dans sa vie. Voici les paragraphes expliquant probablement l’absence de contrat écrit et le contexte de l’entente verbale :
[14] La preuve, non contredite, révèle que la défenderesse [Madame] s’est amourachée du demandeur [Monsieur], mais que ses sentiments étaient unilatéraux. Elle ne le considérait pas comme un simple entraîneur de cheval, mais plutôt comme un ami qu’elle tentait de conquérir.
[15] Du jour où monsieur (…) lui a signifié qu’il ne partageait pas les mêmes sentiments et qu’il avait quelqu’un d’autre dans sa vie, la relation entre les deux s’est rapidement estompée, madame (…) décidant de rapatrier l’animal dans son patelin.
Certains accessoires d’équitation furent conservés par Monsieur. Madame a déposé une plainte policière. Monsieur a remis volontairement les accessoires à Madame.

Monsieur transmet alors une mise en demeure à Madame pour lui réclamer des sommes d’argent en dédommagement du travail d’entraînement fait avec son cheval. La poursuite judiciaire est déposée devant la Division des petites créances de la Cour du Québec quelques mois plus tard. 

Selon les prétentions de Monsieur, il était entendu que Madame le rémunérerait pour l’entraînement du cheval, éventuellement en lui donnant la moitié du droit de propriété du cheval. Monsieur ne réclame pas la part de propriété indivise du cheval, mais plutôt certains montants totalisant 9 968,27 $, dont les frais de transport pour les compétitions, les frais d’entraînement et divers autres frais. 

De plus, Monsieur prétend que son entraînement aurait augmenté la valeur du cheval jusqu’à 35 000 $. Puisque Madame conserve le cheval en pleine propriété, elle s’enrichirait à ses dépens. 

LA DÉCISION DU TRIBUNAL 

Malgré toute la sympathie que l’on peut éprouver pour l’une ou l’autre partie dans ce litige, les règles de droit devaient être appliquées comme l’a fait le Tribunal. À cet effet, les règles de preuve établissent que 1) c’est Monsieur qui avait le fardeau de prouver l’entente de remboursement des dépenses encourues pour l’entraînement du cheval ; et 2) que cette preuve doit être absolument écrite lorsque le montant réclamé excède 1 500 $. Donc, le seul témoignage de Monsieur n’était pas admissible pour tenter de prouver l’entente qui aurait existé avec Madame, sauf si Monsieur avait eu un commencement de preuve extérieur ou un aveu de Madame. 

Le Tribunal a rejeté un à un les postes de réclamations de Monsieur pour absence de preuve probante, incluant les dommages moraux vécus par sa séparation d’avec le cheval. 

Quant à l’enrichissement prétendu de Madame du fait de l’entraînement du cheval, le Tribunal constate l’absence de preuve probante quant à la valeur du cheval après les mois d’entraînement, d’autant qu’il serait impossible de déterminer que l’augmentation de valeur serait attribuable au travail de Monsieur. Finalement, le Tribunal conclut que Monsieur ne s’est pas appauvri, mais a plutôt bénéficié d’un cheval à monter, alors que Madame encourait la majeure partie des frais. 

À RETENIR 

Certains trouveront peut-être une certaine injustice au fait qu’une partie ne puisse présenter son témoignage comme preuve d’une entente verbale, lorsque le montant en jeu dépasse 1 500 $. Il s’agit d’une règle d’admissibilité de la preuve acceptable et justifiée, selon nous, quoique la limite de 1 500 $, qui date de la réforme du Code civil du Québec de 1991, mériterait d’être revue à la hausse, si ce n’est pour tenir compte de l’inflation des trente dernières années. 
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La narration des faits telle que rapportée dans cette décision laisse néanmoins transparaître que le Tribunal a attentivement écouté le demandeur, mais n’était pas satisfait de la force probante et du poids persuasif des explications données1. La leçon à retenir de cette histoire : le contrat écrit est la meilleure façon d’éviter les situations confuses et de protéger toutes les parties impliquées. 



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